La société civile immobilière est un outils de gestion immobilière privilégié. Elle permet de se constituer un patrimoine par l’effet de levier du financement bancaire. C’est aussi un outil de préparation à la retraite.
En effet elle permet de se prévoir des revenus complémentaires lorsque les revenus d’activité disparaissent. Les locations produisent des revenus fonciers qui une fois l’emprunt remboursé sont disponibles pour les associés. Enfin c’est aussi un excellent support à la transmission notamment par le démembrement possible des parts et la conservation de l’usufruit (les loyers sont toujours encaissés par le donataire et à sa succession ses héritiers nu-propriétaires n’ont pas de droits de succession à payer).
La SCI semble donc comporter beaucoup d’avantages dans un cadre familial et très peu de contraintes. C’est une société civile qui n’est donc pas impactée par le droit plus contraignant des sociétés commerciales (les capitaux propres peuvent être inférieurs à la moitié du capital social, le formalisme juridique est moins contrôlé puisque le dépôt des comptes n’est pas obligatoire….).

Attention cependant au respect du formalisme. La SCI nécessite la présence de deux associés et c’est une des contraintes importantes. En effet la présence de deux associés indique un risque futur de désaccord. La mésentente existe aussi dans un cadre familial. Il est donc important pour le gérant de respecter ses obligations comme le rappelle cet arrêt de la Cours de Cassation du 23 octobre 2019.
À la suite d’un divorce, l’ex-épouse et les enfants reprochent au gérant de ne pas avoir rendu compte annuellement de sa gestion. Les faits les plus anciens datent d’une vingtaine d’année, date de la création de la société. L’entreprise est familiale, et aucune demande d’information ou de communication d’éléments de gestion n’avait été préalablement sollicités par les parties.
La Cour d’Appel avait retenu ce motif pour rejeter la demande de l’ex épouse et des enfants qui ne pouvaient prouver avoir régulièrement et vainement sollicité du gérant à rendre compte de sa gestion.
La Cour de Cassation censure cette décision dans un arrêt en se fondant sur l’article 1856 du Code civil qui impose au gérant de rendre compte de sa gestion au moins une fois par an:

En effet l’article 1856 du Code civil ne prévoit pas que le respect de cette obligation nécessite une demande préalable des associés. Par ailleurs les rapports familiaux des associés et du gérant n’ont pas d’incidence sur l’exécution de cette obligation. Le gérant est donc révocable pour juste motif.

Il ressort de cet arrêt l’importance du respect du formalisme des assemblées générales annuelles et de l’établissement par le gérant d’un rapport de gestion. Ce formalisme est nécessaire afin d’assurer une bonne communication sur la gestion de la société. Il est important de rappeler à ce titre la responsabilité des associés d’une société civile, qui répondent indéfiniment des dettes sociales proportionnellement à leur part dans le capital. Cette responsabilité est souvent oubliée en raison des risques financiers plus modérés des activités civiles comparativement aux risques supportés par les activités commerciales. La souplesse de la société civile en tant qu’outil de gestion patrimoniale doit être encadrée par un formalisme juridique rigoureux afin d’éviter de futurs déboires.

Christelle TONDEUR MINIER
Expert Comptable
Expert en gestion de patrimoine
CABINET EC15